Comment ça va? On me pose beaucoup la question ces jours-ci à l’épicerie, sur la rue, à l’école de mon fils, partout où je me risque à trainer mon grand corps déglingué. Je sens bien dans le ton de la question, dans la subtile affection que les gens mettent dans leur interrogation, qu’ils veulent des nouvelles de l’opération. Pour le moment, je n’ai pas trouvé de meilleure réponse que : « ça va mieux! ».
Mieux qu’à l’hôpital où j’ai souffert le martyre parce que l’épidural qui devait soulager la douleur dans mon abdomen ne fonctionnait qu’à moitié.
Mieux qu’au moment où j’ai découvert avec effroi la cicatrice de 30 centimètres qui me barrait le corps, sorte de demi-lune rappelant ironiquement un sourire.
Mieux que ces premiers jours à marcher avec un soluté dans un couloir en comptant péniblement mes pas, tout essouflé, alors que je me préparais quelques jours plus tôt à courir un marathon.
Oui, ça va mieux.
Comme un rescapé de la route, l’air hagard, qui sort par la fenêtre brisée de sa voiture renversée dans un fossé, en époussetant les éclats de verre sur lui, heureux d’être en vie, mais complètement sous le choc d’être passé si près de la catastrophe.
Depuis maintenant un mois et demi, je vis donc sans un rein. Les résultats de la pathologie effectuée sur la masse qui le recouvrait sont maintenant connus: cancer à cellules claires, le plus courant des cancers du rein.
Par chance, le crabe a été stoppé à temps, avant qu’il ne contamine des ganglions autour ou d’autres organes. Gros soupir de soulagement. Malgré tout, comme me l’a si bien expliqué le médecin, le cancer fera dorénavant partie de ma vie. Tous les six mois, je devrai me repointer à l’hôpital pour passer des tests afin de m’assurer qu’il ne réapparait pas ailleurs. Un stress de plus qu’il me faudra apprendre à gérer et à dompter!
Sinon, le moral tient le coup. Bien sûr, je pleure encore souvent pour rien, je suis à fleur de peau constamment et je deviens irascible très rapidement (un vrai bougon!), mais je savoure tout de même la vie et remercie le destin de m’avoir permis de surmonter cet obstacle. Je le remercie de m’offrir encore la possibilité de serrer mes enfants dans mes bras, d’embrasser ma blonde, de prendre un verre de vin avec mes amis, d’accueillir mes parents pour diner, je le remercie pour tout l’amour que j’ai reçu de parfaits inconnus, sur la rue et sur les médias sociaux.
Alors voilà, la vie continue. Ayant épuisé mes coffrets DVD, usé mes pouces sur mes manettes de Xbox et PS3 et englouti les deux derniers tomes de Ken Follet, je suis enfin prêt à reprendre le boulot. Je serai de retour derrière le micro de Puisqu’il faut se lever lundi matin et commencerai sous peu à plancher sur la nouvelle saison de Vlog.
Bref, je tourne la page, bien heureux que l’histoire se poursuive!
Merci à vous. Et merci la vie!
PS : J’ai accepté de me confier à mon ex-collègue de TVA Pascale Wilhemy pour le compte du magazine 7 Jours, où je suis collaborateur. Son texte, magnifique, est dans l’édition de cette semaine. Je fais même la une! Une expérience plutôt étrange pour un gars discret comme moi.
Ce sera sans doute la seule entrevue que je donnerai sur le sujet. Par pudeur. Et parce que ça remue trop de choses lorsque je reparle des événements des dernières semaines. Alors profitez-en!